Fermeture d’entreprise: comment gérer les médias et limiter les dommages
En janvier 2023, l’entreprise beauceronne Bizou a fait parler d’elle en mettant fin à ses activités et celles de tous ses détaillants. La nouvelle a été largement médiatisée partout au Québec. L’entreprise vivait déjà sous le respirateur artificiel après avoir été placée à l’abri de ses créanciers. Les dirigeants ont manqué une belle occasion de contrôler le message en temps réel et de gérer convenablement l’annonce de la fermeture des 45 boutiques au Québec et au Nouveau-Brunswick.
En effet, plusieurs jours se sont écoulés entre l’annonce dans les médias de la faillite de Bizou par l’entremise de témoignages de détaillants et le communiqué de l’entreprise expliquant les motifs de fermeture. Conséquence : la nouvelle a « roulé » pendant une semaine dans les médias alors que les dommages auraient pu être limités à 48 heures. Dans ce cas précis, il y a eu une insensibilité de la direction ou un problème de communication.
Tout ce qui implique une fermeture est d’abord et avant tout une opération de damage control. Et la clé du succès, c’est la préparation. Toujours! Disons-nous les vraies affaires : c’est facile de parler aux médias lorsque les choses vont bien ou que votre entreprise vit une croissance exponentielle. Ça en est une autre de leur faire face quand ça va mal et que vous devez mettre la clé sous la porte. Faire atterrir une mauvaise nouvelle, c’est un défi de communication non négligeable. L’objectif : limiter les dommages et protéger votre réputation.
Voici 4 conseils à suivre pour vous aider à limiter les dommages lors d’une fermeture d’entreprise :
1) Préparez votre message à diffuser auprès de vos publics cibles avant
N’annoncez surtout pas la nouvelle dans les médias ou sur Facebook avant d’avoir informé les principaux concernés par la fermeture à venir. Autrement, vous serez accusés de manquer de sensibilité et d’échapper à vos responsabilités. Par exemple, lorsqu’un propriétaire de résidence pour aînés annonce la fermeture de son établissement, son premier public cible doit être les résidents et leurs familles.
Vous croyez que la nouvelle de votre fermeture ne se rendra pas aux oreilles des journalistes? Détrompez-vous. Avec les réseaux sociaux et le bouche à oreille, vous pourriez avoir un journaliste à votre porte moins de deux heures après l’annonce à l’interne. En 2025, il suffit d’un courriel anonyme dans une salle de nouvelles, d’un tweet ou d’une mention sur Facebook…
Qu’allez-vous répondre au journaliste qui fait le pied de grue à l’entrée? Vous devez préparer votre position avant d’annoncer la mauvaise nouvelle. Peut-être croyez-vous que la nouvelle ne soit pas d’intérêt public. Mais si les journalistes décident qu’ils couvrent l’événement, votre nouvelle devient d’intérêt public, que vous le vouliez ou non.
2) Contrôlez votre message
Vous êtes à la tête d’une PME et vous prévoyez annoncer sous peu la fermeture définitive de votre usine? Peu importe votre enjeu, contrôler votre message aide à limiter les dommages. Assurez-vous de véhiculer le même message aux différents publics cibles touchés de près ou de loin par la fermeture. Bref, ne dites pas une chose par voie de communiqué et tout son contraire sur votre page Facebook. Ne donnez pas une explication en privé à votre député (qui en passant commentera la nouvelle avec vos médias locaux) et l’inverse aux journalistes. Parce que là, c’est vrai, vous serez plongé dans une crise médiatique. Et vous donnez du gaz pour l’alimenter.
En relations publiques, le communiqué de presse demeure un outil de communication efficace pour contrôler le message :
- La diffusion du communiqué peut être suffisante pour engendrer une couverture médiatique mur à mur et instantanée, rapportant vos explications avec justesse et clarté.
- Recourir à un communiqué est une tactique parmi plusieurs autres et il est probable que d’autres gestes à poser soient nécessaires lors de votre fermeture, dont celui d’accorder des entrevues.
Le véritable défi, c’est d’être cohérent et de diffuser la bonne information à vos publics cibles et sur l’ensemble de vos plateformes. Et surtout au bon moment. Oui, adaptez votre contenu si vous le partagez dans une infolettre ou sur vos réseaux sociaux, mais assurez-vous de contrôler le message en diffusant la même information à tout le monde.
3) Choisissez le bon porte-parole pour annoncer la mauvaise nouvelle
Dans un monde idéal, le chef d’entreprise devrait toujours être la personne qui parle aux médias pour annoncer la mauvaise nouvelle. Pourquoi? Parce que c’est lui qui est le mieux placé pour expliquer pourquoi il ferme son entreprise. Qui est le chef d’orchestre quand l’entreprise est en croissance? Le chef d’entreprise. Qui est le capitaine du bateau quand le navire frappe un iceberg? Le chef d’entreprise. Pour les médias, ça fait du sens que ce soit ce dernier qui s’explique.
Toutefois, dans la réalité sur le terrain, l’entrepreneur n’est pas toujours la meilleure personne pour affronter la meute de journalistes. Si le chef d’entreprise a horreur des caméras et une peur bleue des médias, mieux vaut qu’un bras droit plus à l’aise et en contrôle s’adresse aux médias. Dans une PME, cette personne peut être le vice-président, le directeur général, le directeur des opérations ou le responsable des communications et du marketing.
Le recours à un porte-parole externe devrait être une solution de dernier recours si personne n’est à l’aise de parler aux journalistes. Ce porte-parole externe, aussi habile et efficace est-il avec les médias, n’a pas la même sensibilité de l’entreprise qu’un membre de l’équipe. « Moi, je veux parler au boss ! », martelait un matin l’animateur de radio Paul Arcand au sujet des porte-paroles. Si un dirigeant crédible à l’interne peut faire le travail, faites-en votre porte-parole officiel. Avec son regard externe, le relationniste sera indispensable pour vous conseiller sur la marche à suivre, la stratégie de communication à adopter et les messages à véhiculer.
4) Faites preuve d’empathie et de compassion
S’il vous plaît, faites preuve d’empathie. Une empathie sincère et sentie. Mettez-vous à la place des gens qui sont directement touchés par la fermeture de votre établissement. Mettez-vous dans les souliers du travailleur qui perd son emploi alors qu’il a de la difficulté à joindre les deux bouts. Soyez humain. Car au-delà des stratégies et du message à livrer, les médias vous jugeront sur la façon dont vous traitez les gens.
Gardez en tête que votre compassion et votre leadership comme chef d’entreprise pourraient aussi vous attirer un capital de sympathie. Et ça pourrait faire la différence le jour où vous repartirez en affaires. Parce que vous aurez, malgré le malaise et les dommages, été au-devant de la tempête et pris les moyens pour protéger votre réputation.
David Couturier