Crise des passeports : 4 leçons de communication pour les dirigeants

La crise des passeports a été au cours des dernières semaines un cirque médiatique au Québec. Des leçons de communication peuvent en être tirées pour n’importe quel haut dirigeant.

Au-delà de la crise politique et les longues files d’attente en direct à la télévision, Service Canada a commis des erreurs de communication monumentales. Ces erreurs ont contribué au cafouillage vécu devant les bureaux de passeport au Québec et le spectacle médiatique dont nous avons assisté.

Cette situation fâcheuse aurait-elle pu être évitée ou mieux gérée? Voici 4 leçons de communication à retenir :

1) Anticiper

Après deux ans de pandémie et des dizaines de milliers de passeports échus, Service Canada n’a pas anticipé l’effet d’entonnoir des demandes de passeports à l’aube des vacances.

Comme dirigeant, êtes-vous en mesure d’anticiper des événements à l’interne et à l’externe qui pourraient impacter l’image de votre organisation sur la place publique et nuire à vos activités? Pouvez-vous les identifier? Ces événements peuvent-ils être bien gérés en amont? Les situations que vous appréhendez peuvent-elles entraîner une gestion de crise médiatique et/ou une crise de confiance avec les publics cibles avec lesquels vous êtes en relation? Votre organisation a-t-elle un squelette dans le placard?

Anticipez les imprévus. Posez-vous les bonnes questions et identifiez les écueils potentiels avant la crise. Vous pourrez choisir les bons gestes de communication à poser en amont.

2) Bien communiquer

Depuis le début de la crise des passeports, les citoyens qui font la file se plaignent de n’être informés de rien. L’absence d’information, aussi fragmentaire soit-elle, est inacceptable dans n’importe quelle crise. Bien sûr, la ministre fédérale responsable du dossier, Karine Gould, subit une forte pression des médias et s’est prêtée à une tournée d’entrevues médiatiques pour calmer le jeu. Mais c’est nettement insuffisant. Avant de parler aux médias, il faut s’assurer de communiquer avec son premier public cible : dans ce cas-ci, les demandeurs de passeports.

Lorsqu’une crise éclate, votre premier souci, c’est de communiquer avec les personnes directement concernées. Ces personnes sont-elles bien informées des mesures que vous prenez pour remédier à la situation hors de votre contrôle? Avez-vous choisi les bons canaux de diffusion pour transmettre de l’information et communiquer? Laissez faire votre page Facebook si les principaux concernés ne vous suivent pas!

Trop souvent, certains dirigeants en panique priorisent une publication sur les réseaux sociaux ou la diffusion d’un communiqué de presse aux médias. Les deux options sont évidemment envisageables selon la nature de la crise, mais prenez-vous les bons moyens pour rejoindre directement les personnes concernées?

Pour vous préparer convenablement, faites l’exercice suivant : mettez-vous à la place d’un dirigeant d’une entreprise de transformation alimentaire qui doit retirer d’urgence son produit des tablettes d’épicerie. Quels canaux de communication utiliseriez-vous pour prévenir votre clientèle du danger qui les guette si elle consomme votre produit? Choisir les bons canaux de communication, c’est crucial.

3) Collaborer avec les médias et identifier votre porte-parole

En plus de s’abstenir de communiquer avec les demandeurs de passeports, Service Canada n’a pas, au plus fort de la crise, accordé d’entrevues aux médias. Seule la ministre responsable du dossier agissait comme porte-parole. Aucun cadre ou porte-parole sur place n’était disponible pour les médias. Exit les leçons de la crise du verglas et de la pandémie. Devant les bureaux de passeports, des agents de sécurité ont même repoussé les journalistes, prétextant qu’ils se trouvaient sur un « territoire fédéral » !

Lorsqu’une crise médiatique éclate, faites votre deuil : vous ne pourrez pas ignorer les médias. Aussi bien collaborer avec eux et communiquer. Autrement, les journalistes exerceront une pression en crescendo devant l’absence d’informations, ce qui alimentera la perception que votre organisation a des choses à cacher, manque de transparence et/ou incompétente face à la crise.

Avant et pendant la crise, prenez soin d’identifier le porte-parole qui répondra aux questions des médias au nom de votre organisation. En déterminant un point de chute pour les médias, vous envoyez un premier signal : vous prenez la crise au sérieux.

4) Préparez un Plan de gestion de crise médiatique

La crise la mieux gérée est souvent celle pour laquelle vous vous serez préparé. Un Plan de gestion de crise médiatique, adaptable selon vos enjeux potentiels, vous aide à mieux vous préparer devant toute éventualité.

Un point de vue externe vous aidera à y voir plus clair. Soyez bien accompagné dans cet exercice pour identifier les risques et les situations potentielles de crise, cibler les écueils pour vos communications, préparer des messages-clés efficaces pour les médias et coacher votre porte-parole pour répondre aux questions ardues des journalistes. Parce que les journalistes seront insistants.

« Je me sens prêt et je sais maintenant ce que je dois faire », m’avait répondu un client après avoir pris connaissance du plan de match que je lui avais préparé.

Établir en amont la marche à suivre vous procurera un sentiment de sécurité comme dirigeant. Vous vous sentirez prêt face à une éventuelle crise médiatique. Comme un pilote d’avion qui appréhende une zone de turbulences.

 

David Couturier